Raison garder, même et surtout face aux horreurs de la déraison.
Mais aucune théorie philosophique, géopolitique, religieuse ou interculturelle ne m’empêchera de proclamer, face à la terrible violence terroriste, ma passion de la vie. À cette aune, les évènements de cette nuit en Ile-de-France soulèvent en moi une colère extraordinaire, comme je n’en ai pas connu souvent, dans notre République : les guerres d’Indochine et d’Algérie, le massacre des algériens de Paris par le préfet Papon le 17 octobre 1961, les crimes de l’OAS, ceux de Merah, de Charlie et de l’hyper casher…pour ceux des nazis, j’étais un enfant trop jeune pour transformer ma terreur en fureur.
Je n’ignore pas que ces impitoyables gamins, issus des bords de la Méditerranée, du proche et du moyen orient, ou de l’hexagone, croient proclamer ainsi je ne sais quel désespoir existentiel, ou un improbable combat pour leurs convictions délirantes, à la manière, selon eux, de Jan Palach à Prague, de Federico Garcia Lorca à Grenade ou encore de George Byron aux environs de Lépante. Mais ceux la défendaient des valeurs humanistes et ne tuaient pas, ils étaient au contraire détruits au nom de ces valeurs. Non les assassins de cette nuit ne sont pas les héritiers de ces grandes figures inspirées et engagées jusqu’à leur mort pour la liberté.
Ils ne sont que des robots glacés, actionnés par leurs commanditaires, via internet ou SMS, obéissant aveuglément à des chefs politiques cyniques et sanguinaires qui les envoient nous tuer en grand nombre et avec jouissance, puis se tuer ou être tués. Ils aiment plus la mort que nous la vie. Conditionnés physiquement ou électroniquement ils tombent dans une addiction à l’ordalie, au défi doublement mortel qui les nie en tant que personnes : ils ne sont pas les sujets d’une grande cause mais les objets, inhumains, d’une manipulation planétaire.
Mais explication ne vaut pas justification : téléguidés, conditionnés ils ne sont pas moins assassins, bourreaux, tueurs. Je suis depuis toujours opposé à la peine de mort prononcée par un tribunal. Mais aujourd’hui et dans cette abominable situation, il ne s’agit pas d’une justice indépendante rendue par des institutions démocratiques. NOUS SOMMES EN GUERRE et ces assassins sont les soldats d’une armée ennemie qui veut nous détruire, comme individus et comme civilisation. Nous devons nous défendre et comme êtres humains et comme garants de ces valeurs. Il faut éliminer et détruire nos ennemis. Sans pitié pour eux qui ne la connaissent pas, sans remords pour eux qui le méprisent, sans compassion pour eux qui suppriment la vie et méritent de mesurer ce qu’est la mort.
Je ne suis pas heureux de ce que j’écris en cette nuit du 13 au 14 novembre mais je crois demeurer fidèle à l’esprit de la Résistance qui ne redoutait pas d’infliger la mort à ceux qui la distribuaient autour d’eux. Pas heureux mais ma main ne tremble pas.
La France, l’Europe, le monde sont en guerre contre ce cancer métastatique qui veut nous terroriser et nous exterminer. Mais si nous refusons la peur, si nous avons le simple courage de faire face, ces tueurs ne sont rien. Ils ne sont forts que de la faiblesse de leurs cibles. Au totalitarisme implacable opposons une guerre totale, au fanatisme déchainé une claire, calme et généreuse détermination (et déjà en accueillant les migrants comme des êtres humains).
Sachons résister à la peur mais aussi à la haine. Soyons solidaires avec toutes les personnes en situation de précarité ( autochtones ou migrants), et impitoyables avec les agents de la mort. Malgré les douleurs indicibles devant ces corps massacrés, les chagrins infinis des familles et des proches, le deuil qui afflige notre République, osons affirmer tous ensemble: NOUS N’AVONS PAS PEUR, VIVE LA VIE.
Oui, il est triste d’écrire que nous n’avons pas le choix de la violence, mais la réalité nous l’impose et nous devons faire face, et ne pas trembler.
Et n’oublions pas également l’humilité dans les combats qui s’annoncent. Ce sera long, périlleux et difficile, nous ne connaissons pas l’issue de manière certaine, il va falloir faire preuve de beaucoup d’humilité pour saisir au mieux les opportunités. Mais nous sommes nombreux, également, de ce côté-ci, de ceux qui aimons la vie, et qui comptons bien la défendre de manière acharnée.
Merci pour votre texte.
Humilité certes, évitons l’Hybris.
Mais aussi unité, solidarité, force calme mais impitoyable.
Merci d’écrire, avec tant de talent, ce que nous sommes nombreux à penser et prôner : La Défense de notre civilisation, de nos acquis, de notre histoire, de nos livres…et bien-sûr de nos vies ! Les hordes barbares sont à nos portes, nous enfermer, nous calfeutrer dans nos maisons, ne les empêcheront pas de tuer !
Nous savons tous combien tu as lutté, hier et aujourd’hui, pour la défense des Droits de l’homme, pour la solidarité, pour l’apaisement des conflits, parce que tu es, avant tout, un humaniste !
Alors, mon ami, je te demande de partager ta colère..
Bien sur nous partageons la colère et je te remercie de me rejoindre. Mais une colère froide et déterminée, sans haine. L’Europe en a vu d’autres: Hitler, Staline, Salazar, Franco, les colonels en Grèce et tous les moins célèbres. Et toujours l’humain l’a emporté, et la liberté guidait les pas de ces merveilleux combattants de la vie.
merci Henri
Nous n’avons que les mots comme armes en bandoulière, mais ils sont si importants.
Et puisqu’il faut résister, résistons de toutes nos forces
Nathalie
Nos mots à nous sont nos projectiles.
Sachons les choisir et n’hésitons pas à tirer.
J’ai peur. J’ai peur pour mes proches plus que pour moi mais j’ai peur pour moi aussi. J’ai peur pour les êtres chers ostensiblement engagés dans cette guerre qui sont ou pourraient être personnellement menacés.
J’ai peur mais ma peur fait surgir du plus profond de mon être une telle révolte ! Alors je résiste : je prends l’avion, le train, le métro ; je déjeune en terrasse ; je flâne dans les grands magasins. Je vis, et jusqu’à mon dernier souffle je me veux vivante !
Mais bien sur la folie sanguinaire de ces illuminés fait peur. Ceux qui disent le contraire ne sont pas lucides.
Mais le courage s’illustre précisément par la volonté de surmonter cette inquiétude et de continuer comme si de rien n’était (de leurs menaces). Ils veulent nous ôter la vie? Donc vivons à fond.
Compte tenu de la force considérable des textes lus, de leur justesse en ces temps difficiles et de l’espoir qu’ils portent également, je voudrais signaler et recommander à toutes et tous l’écoute de la dernière émission de Jean Claude Ameisen, « Sur les épaules de Darwin », l’écoute est possible à cette URL : http://www.franceinter.fr/emission-sur-les-epaules-de-darwin-liberte-egalite-fraternite
Je confirme la qualité de cette émission que je vous invite tous à écouter: elle propose des citations magnifiques de grands combattants de la liberté et de la solidarité. Merci Joël.
Non cher Henri Sztulman, je ne peux souscrire à vos propos qui délaissent le fondement humaniste de votre doctrine « Ne pas subir, ne pas faire subir » au profit d’une nouvelle qui serait « Faire subir pour ce qu’on a subit ». L’esprit de résistance dont vous parlez me parait plus conforme à ceux qui luttent sur une terre qui est leur et qu’ils veulent reprendre qu’à ceux qui larguent des bombes à 7000 mètres de hauteur sur des populations civiles servant de boucliers humains aux lâches. Détruire Daesh oui. Une guerre totale? Non. Nous devons d’abord détruire nos propres démons (et il sont nombreux) avant que de s’attaquer à leurs rejetons : nous (le capitalisme occidental) avons créer Daesh, nous avons joué aux apprentis sorciers avec les dictatures arabes et africaines et aujourd’hui nous voulons nous dédouaner en crevant à coup de massacre l’enfant ignoble. Brecht disait » Le ventre est encore fécond d’où à surgit la bête immonde. » Qui aurait pu croire après la deuxième guerre mondiale que nous serions sa mère?…
Pardon pour les fautes de frappe, je me relirai plus attentivement au prochain post.
Nous avons effectivement beaucoup à faire avec nos propres démons, intimes, mais également à l’échelle de la société occidentale compte tenu des dérives du capitalisme. Mais non, Daesh n’est pas notre rejeton et s’il faut chercher une filiation, elle est claire et il faut regarder du côté du Wahhabisme, de l’Arabie Saoudite ou du Qatar. Nous devons demeurer lucides.
Et nous ne pouvons pas évacuer la question de responsabilité individuelle. Quelques soient les épreuves qui nous sont parfois imposées, en raison de parcours de vie difficiles, nous demeurons, in fine, chacun d’entre nous, responsables de nos actes.
Merci, cher Requin, pour cette contribution nécessaire au débat. Nous pensons toujours mieux à plusieurs, particulièrement quand nous sommes affrontés à des situations complexes, et de surcroit dans les moments d’intense émotion que nous traversons. Vous, Joël et tant d’autres qui n’ont pas souhaité s’exprimer sur le bloc notes mais qui m’ont fait part de leurs réactions, observations, remarques me conduisent à préciser mes positions et à élaborer davantage. Je m’y emploie et prépare un nouvel article: Pensons ensemble l’horreur, à paraitre sous peu.
« Il faut tuer les tueurs et leurs commanditaires » « il faut aller se battre au sol » Ces injonctions au courage souvent entendues donnent le vertige.
Pleurons notre impuissance ! Qui va aller à la rencontre des terroristes, qui va les poursuivre ? Surtout pas ceux que j’aime, mes amis, mes voisins. « on » « ils » « eux » vont y aller, les autres. Ils vont s’engager pour « tuer les tueurs et leurs commanditaires … » comme l’ont fait ou essayé de faire nos pères…en tout cas le mien et le vôtre, et tant d’autres….Comment ont-ils pu faire cela ? Que nous diraient-ils aujourd’hui?
Bien sûr que ce n’est pas la guerre contre les français de religion musulmane, mais comment faire front à ces attaques, sinon en allant en effet combattre les commanditaires sur le terrain ?
La lecture de votre article m’a confortée dans mes sentiments. Mais il reste un grand désarroi. Où sera le prochain attentat ? Manquons-nous de courage ? Ce message ne se veut pas provocateur mais sincère. Je commence à ressentir une gêne devant tous les beaux discours. Mon état de vieille dame de plus de soixante-dix ans ne me donne pas le droit de dire tout cela, ce n’est pas moi qui vais partir en guerre. Ma sincérité m’ expose à dire des monstruosités ! Pauvre de moi ! « Tu n’y comprends rien me dit-on, c’est une armée de métier, avec des soldats formés , qui est capable d’aller au combat. » Est-ce si vrai?
Ce commentaire n’est peut-être pas à prendre au pied de la lettre, les gens disent n’importe quoi.
« C’est par l’éducation, la science et la culture que l’on vaincra les ténèbres » Yvon Mayeur, bourgmestre de Bruxelles en visite hier au Conseil de Paris. Je suis en total accord avec cette façon de penser.